Saint-Nazaire : Laurianne Deniaud démissionne
La première adjointe Laurianne Deniaud, l'adjointe au sport Gaëlle Bénizé-Thual et l'adjointe aux affaires sociales Régine Le Bail ont annoncé leur démission aujourd'hui.

La tension est loin de s’apaiser au Conseil Municipal de Saint-Nazaire où la première adjointe fait actuellement l’objet d’une plainte de la part de l’adjoint aux finances Martin Arnout pour diffamation, sur fond d’agression sexuelle présumée. On en est ainsi à quatre démissions de femmes en deux jours, la victime présumée, Gaëlle Betlamini ayant démissionné hier de son poste d’élue. Laurianne Deniaud a annoncé en fin d’après-midi sur France 3 Pays de La Loire qu’elle ne présentera pas de liste contre David Samzun, et d’expliquer sa décision « Je ne peux plus être solidaire ce cet exécutif qui traite pour moi de manière aussi inconséquente des questions de violences sexuelles » et de rajouter à propos de David Samzun « Je regrette profondément que David Samzun n’ait pas protégé la victime présumée, n’ait pas su l’entendre, l’accompagner, n’ait pas montré non plus encore dernièrement d’empathie, à son égard… » Laurianne Deniaud démissionne de son mandat exécutif mais reste membre du Conseil Municipal.
Le communiqué de presse annonçant la démission de trois adjointes au maire de Saint-Nazaire
Nous avons envoyé ce soir nos lettres de démission de nos fonctions d’adjointes au maire de Saint-Nazaire, M. Samzun.
Après avoir servi avec fierté les Nazairiennes et Nazairiens depuis le début du mandat, après avoir chacune dans nos fonctions pleinement participé à la mise en oeuvre du projet de la liste fraternelle et inventive, c’est en responsabilité que nous avons pris notre décision. Elle constitue un déchirement pour chacune d’entre nous, mais elle est devenue inéluctable pour rester fidèles à nos valeurs et aux convictions qui nous animent.
Elle est le résultat d’une année et demi où plusieurs élues ont dû faire face à une situation éprouvante et, ces dernières semaines à une violente campagne de dénigrement et d’intimidation.
Au printemps 2018, le maire a été alerté sur trois points :
• l’existence de confidences relatives à des faits pouvant, s’ils étaient avérés, être qualifiés de viol, subi par une élue
• des inquiétudes graves concernant d’autres situations
• un climat oppressant de sexisme quotidien que nous ressentions à la mairie
Nous sommes attachées à la présomption d’innocence comme au travail de la justice. Cela ne peut en aucun cas exonérer un employeur, un chef d’équipe, un responsable politique de ses devoirs et responsabilités. Nous n’avons pas choisi qu’une de nous soit attaquée en justice, nous n’avons pas choisi de médiatiser la situation.
Depuis bientôt quatorze mois, aucune réponse à la hauteur de la situation sur ces trois alertes n’a encore été apportée. Les femmes qui ont porté cette parole ont été discréditées et mises au banc de la majorité.
• Nous regrettons profondément que le maire n’ait pas joué pleinement son rôle de protection et de soutien auprès de notre collègue Gaëlle Betlamini. Que sa parole n’ait pas été entendue et accompagnée, qu’il n’ait montré aucune empathie à son égard depuis la révélation de ces faits.
• Nous avons évoqué dans différents cadres à diverses reprises le sexisme, l’environnement sexualisant et oppressant que nous avons subi. Nous avons toutes entendu de la bouche de différents élus, des anecdotes et des propos sexualisant les femmes, qui les feraient rougir de honte s’ils étaient répétés publiquement. Nous avons dit à plusieurs reprises que ces propos n’étaient pas acceptables, sans qu’ils ne cessent pour autant. Nous avons vu les regards déplacés et entendu les propos dégradants sur des collaboratrices.
• Depuis l’évocation des faits plusieurs d’entre nous ont été marginalisées à la mairie sous plusieurs formes: annonces dans la presse sur des sujets nous concernant sans que nous en soyons avisées, désaveux devant les services, réorganisations des responsabilités d’adjointes sans discussion préalable, échanges directs du maire sur nos dossiers sans que nous en soyons informées, invisibilisation de notre travail…
• Plus d’un an après les premières alertes nous constatons que ce qui devait être fait dans la collectivité ne l’a pas été. Demander aux DGS si d’autres situations existent n’est en rien comparable avec l’ouverture d’une enquête interne sérieuse, impartiale et objective confiée à un tiers spécialiste de ces sujets.
• La plainte en diffamation déposée par M. Arnout contre Laurianne Deniaud s’est inscrite dans le cadre d’une réunion du maire où ce dernier a choisi d’aborder le sujet. Cette plainte de M. Arnout s’appuie sur deux attestations d’adjoints et un mail envoyé par le directeur de cabinet du maire. La non-dénonciation de cette plainte sonne comme un soutien aux stratégies d’intimidations face à la libération de la parole des femmes.
En préférant inquiéter plutôt que rassurer, en refusant d’agir, ce silence gardé comme les rumeurs distillées par certains, ont créé un climat discriminant mais aussi délétère pour les élues concernées.
Depuis la sortie publique de l’affaire, nous assistons à une campagne de dénigrement orchestrée et à de violentes tentatives d’intimidations.
Salir méthodiquement les femmes s’exprimant contre un système sexiste est une stratégie habituelle dans les affaires de violences sexuelles. Les décrédibiliser, leur attribuer des ambitions ou des intentions cachées est le procédé classique des agresseurs ou de leurs alliés pour se couvrir.
Cette manière de gérer la situation est en contradiction avec nos convictions. Notre engagement trouve sa source dans la défense de la dignité humaine, la lutte contre les injustices et l’attachement à l’égalité. Au-delà des attaques, des violences verbales et psychologiques à notre encontre, ce sont les actes posés par le maire qui ont creusé une fracture avec nos valeurs humaines et politiques les plus fondamentales.
L’honneur et l’intégrité ne sont ni dans un titre ou une fonction mais bien dans les actes.
Le respect de soi-même et de ses idées en constitue la meilleure part. Nous resterons fidèles aux principes et aux convictions qui nous guident.
C’est le sens de notre démission : nous ne pouvons plus cautionner cet exécutif qui, par ses positions et le climat qu’il instaure, encourage l’omertà.
Nous voulons dire aux femmes qui parlent qu’elles ont un courage immense, que des associations formidables sont là pour les accompagner, que chaque parole nous rend toute plus forte, que nous sommes déterminées à combattre à leur côté toutes les formes de violences sexistes et sexuelles.
Gaëlle Bénizé-Thual, Laurianne Deniaud, Régine Le Bail