Montoir-de-Bretagne : en immersion avec les élèves de l’EPAN, l’école de la confiance et de la réussite

Les élèves en chaudronnerie et soudure apprennent tout en produisant des réalisations pour les entreprises, collectivités, ou particuliers du bassin. Ils ont été chargés de la restauration de la balise rouge de Pornichet dans le cadre de leur projet de chef-d'œuvre.

Visages concentrés, casques vissés sur la tête et lunettes de protection posées sur des regards attentifs, gestes précis et assurés… Dans les ateliers de l'EPAN (École de Production de l'Agglomération Nazairienne), 30 jeunes en bleus de travail s'affairent à la fabrication de pièces industrielles. Ce ne sont pas des chaudronniers ou soudeurs comme les autres, mais des élèves de CAP Réalisation de chaudronneries industrielles et CAP Réalisations Industrielles en chaudronnerie/Option Soudage, qui ont intégré cette école de production atypique, où l'on apprend sur “du vrai”, en prenant des commandes d'entreprises pour les livrer dans les délais. Et au prix du marché. La Ville de Pornichet a confié aux élèves de 1ère année la restauration de sa balise emblématique du front de mer, dans le cadre de leur projet de chef d'œuvre de CAP.

Faire pour apprendre

Le projet d'EPAN a été lancé dès 2021 par Nicolas Cortet, secrétaire général de la raffinerie de Donges, au retour d'un séminaire de la fondation TotalEnergies, qui contribue activement à la création et au développement des écoles de production en France. Élus et acteurs économiques locaux ont vite saisi l'intérêt de ce modèle pour l'agglomération de Saint-Nazaire, où le “faire pour apprendre” est aussi gage d'employabilité. Des entreprises et organismes comme l'UIMM se sont greffés peu à peu au projet en adhérant au schéma éducatif, et en confiant leur production à l'école financée pour ⅓ par le Ministère du Travail, ⅓ par les collectivités locales, et ⅓ par la production réalisée. Le succès est là. En 2024, avec ses premiers élèves sortis de formation, l'école affichait 100% de réussite, dont 80% avec mention, et 1 mention très bien. 2 espaces consacrés à la chaudronnerie et à des cabines de soudures permettent aujourd'hui d'accueillir un flux continu de pièces telles que des gaines de ventilation, escaliers métalliques, grillages, rambardes d'escalies, ou encore pièces pour la navale.

La restauration de la bouée intégrée dans le cursus

« Nous avons sollicité le maire de Pornichet Jean-Claude Pelleteur en voyant la diversité des matériaux sur le remblai qui font appel à des compétences en chaudronnerie et en soudure. 15 jours, après nous avons pu rencontrer les services techniques, qui nous ont montré la bouée en attente de restauration » raconte Alexis Guilmain, Directeur de l'EPAN. Constituée d'un corps en béton, l'imposante balise sera reconstruite en acier sur une structure tubulaire, avec 4 à 5 anneaux circulaires habillés d'une enveloppe cônique de 3 épaisseurs de tôles. « On va passer de 4 à 5 tonnes à 1 seule tonne » poursuit-il. Le mât d'origine sera conservé, sablé, traité en surface et peint. Les élèves ont étudié le cahier des charges avec leurs 2 maîtres professionnels, réfléchi au planning, travaillé l'apprentissage de la machine, et mis leurs compétences nouvelles en pratique sur des pièces écoles. Puis, ils ont commencé à former les anneaux tubulaires. Un projet complet qui comprend également la relation client-fournisseur, et une présentation orale de la réalisation. Et le maire de Pornichet peut être assuré qu'elle sera livrée dans les temps ! « Cette restauration est intégrée au cursus CAP discipline chef d'oeuvre des élèves de 1ère année, qui leur permet de montrer leur savoir, leur savoir-faire, et leur savoir-être. Les élèves de 2ème année sont quant à eux chargés de la réalisation d'un prototype de support pour la prochaine exposition photo Cargo dans ce même cadre de chef d'oeuvre » poursuit Alexis Guilmain.

Un déclic à la journée d'immersion 

Recrutés essentiellement entre 15 et 17 ans, à travers des dispositifs tels que les 3èmes SEGPA, ou encore pour former de jeunes mineurs non accompagnés, les élèves de l'EPAN ont tous suivi une ½ journée d'immersion avant confirmation de leur inscription. « Nous cherchons la motivation du jeune lui-même, c'est lui qui fait le choix, pas la famille. Il n'y a aucun frais de scolarité, ni sélectivité. Nous suivons le principe du 1er arrivé, 1er inscrit » insiste le Directeur de l'EPAN. L'envie et la passion sont bien présents chez des élèves, heureux d'avoir finalement trouvé leur place. Comme Kenzo, descolarisé, orienté vers l'école par la Mission Locale. Comme Kény qui après un bac pro chaudronnerie, est attiré par la soudure. Comme Ethan, qui a été en difficulté toute sa scolarité, et poursuit aujourd'hui une histoire de famille. « Mon père, mon oncle et mon cousin sont chaudronniers. Les cours, ce n'était pas pour moi. la ½ journée d'immersion m'a vraiment donné l'envie » raconte-t-il. Avec 24h d'atelier par semaine, les professeurs suivent un référentiel décomposé en 195 tâches métiers, et une montée en puissance des compétences et du savoir-faire. « Confier une production à des jeunes qui apprennent demande de la confiance. Les élèves débutent par des pièces moins sensibles, puis les entreprises réalisent tout ce qu'elles peuvent leur confier. Leur venue sur site pour le contrôle qualité donne lieu à des échanges et retours, cela permet aussi de faire d'éventuelles reprises avant le départ de la production ».

Une communauté d'adhérents

Dans les locaux de l'école, Alexis Guilmain montre avec satisfaction le mur des adhérents qui soutiennent l'école : Servisoud, Gestal, Idea Industries, Shipelec, l'UIMM, Ateliers David, Briand Industries, CMR, SMIB, Kermar, CNI, Espace, 3G Industrie, Chouteau Atlantique, Grand Large Yachting, Nautipark, Technidis Docks Maritimes, Saint-Nazaire Agglomération. Leur adhésion ne se résume aux 150 euros de cotisation versés par an. Ils soutiennent l'école dans leur démarche par un mécenat financier mais aussi de compétences, et de constants échanges, en invitant notamment les jeunes aux événements organisés au sein de l'entreprise. L'EPAN a également ouvert un CAP en 1 an pour les détenteurs d'un CAP Industriel, avec des compétences communes. « Les jeunes qui sortent de CAP hésitent parfois à s'inscrire en Bac Pro, et sont en même temps trop jeunes pour l'emploi. Cela leur permet de se perfectionner un an de plus tout en leur apportant plus de polyvalence » détaille Alexis Guilmain. Parmi la première promotion sortie en 2024, 1 jeune est à l'emploi, 1 autre a choisi l'interim, 2 élèves poursuivent leurs expériences en contrat de professionalisation ou en bac pro avec la Fab Academy, 1 dernier suit une année de perfectionnement, et 1 personne est en réorientation. « Nous commençons les entretiens pour la rentrée 2026. 12 jeunes sont recrutés chaque année. Ils peuvent prendre contact avec nous dès la 4ème » invite le Directeur.