Saint-Nazaire : 8 h d’attente, notre passage aux Urgences pendant le pic de saturation
La direction du Centre Hospitalier annonçait ce mardi 23 janvier des délais d'attente rallongés et la priorité donnée aux urgences vitales, nous y étions.
Hasard des circonstances, un membre de SaintNazaireNews était de passage pour une urgence au Centre Hospitalier de Saint-Nazaire ce mardi 23 janvier 2024. Entre patients résignés et désemparés, et abnégation des personnels pour continuer vaille que vaille à soigner, son expérience valait tous les communiqués pour vivre et comprendre de l'intérieur ce que signifie cette expression désormais tristement habituelle : Urgences saturées.
Du personnel en renfort
Dès l'entrée, le ton est donné. De nombreuses personnes âgées patientent avec un regard triste dans leurs lits sur roulettes, et occupent tous les espaces d'attente. Ça tousse… Les visages sont fatigués, avec des lits collés à la machine à café en panne, ou protégés comme on le peut des courants d'air de l'entrée. La grippe et les pathologies habituelles hivernales ne sont pas étrangères à la présence de ces personnes fragiles. Pour rentrer, il faut montrer patte blanche avant qu'une soignante de l'hôpital n'ouvre la porte. On comprend vite qu'elle ne devait pas travailler ce jour là, mais qu'elle n'a pas hésité à revenir pour prêter main forte. Un déploiement de renfort habituel décidé par la cellule de veille de l'hôpital à chaque pic de saturation, avec l'ouverture de lits supplémentaires d'hospitalisation, ou encore le report de certains soins programmés.
Trouver une alternative
Elle questionne sans jamais juger pour évaluer de la gravité. Entre deux va-et-vient à cent à l'heure pour trier seule le flux de malades, servir un en-cas à celles et ceux qui attendent depuis le matin, et s'assurer que personne n'est oublié, elle trouve tout de même le temps de plaisanter avec les personnes âgées, qui on le sent bien, ont besoin de parler. Ce sont elles qu'on entend à plusieurs reprises murmurer « qu'est ce qu'elle est devenue la France ». Sur son ordinateur, des dizaines d'étiquettes colorées correspondent chacune à un patient, elle les déplace et les réajuste en fonction des priorités. Quand les nouveaux arrivants ne sont pas en situation d'urgence vitale, elle leur annonce calmement un très long délai d'attente, leur propose d'aller voir un médecin de ville ou SOS Médecin. Des personnes repartent agacées sans même dire au revoir à la soignante, et sans prendre le dépliant qu'elle leur tend présentant des solutions alternatives. Elle prend sur elle.
Entre résignation et considérations politiques
Après 4 h d'attente, une maman accrochée à son téléphone parvient enfin à décrocher un rendez-vous chez un médecin de ville, pour son ado victime d'une entorse. Ils repartent soulagés. D'autres renoncent effrayés par l'annonce des délais, et repartent dans la nature en lançant « je reviendrai demain ». Certains restent. « C'est mon médecin qui m'envoie, mais si je ne suis pas passé bientôt, je repars » affirment-ils. 5 h après ils sont encore là. Pas le choix. Les accompagnants aussi prennent leur mal en patience. « On ne va quand même pas aller aux Urgences à Nantes » entend-on murmurer. Ils tentent aussi parfois de raisonner leur parent malade pour qui l'attente est difficile « Tu vois bien que ce n'est pas de sa faute. C'est à cause du gouvernement qui ne donne pas assez d'argent » répètent-ils en boucle.
Entrée dans le service après 5 h d'attente
Accident de travail, chute, abcès, appendicite, phlébite, problèmes cardiaques, poignet cassé, absorption accidentelle de détergent… Durant ces 5 premières heures passées dans la salle d'attente du service, les cas les plus divers se sont présentés. Le temps s'écoulant, les personnes âgées ont peu à peu été prises en charge, et la pièce s'est un peu vidée. Quand on est plus jeune, et que sa vie n'est pas en danger, on le sait bien, on passera dans les derniers. L'après-midi est bien avancé, et la soignante a enfin pu partir rapidement déjeuner, un médecin a pris le relais tout en poursuivant la gestion des malades. À son retour, elle repère en un coup d'oeil où sont assis ceux qui attendent depuis le matin. Il faudra encore patienter 2 heures avant de quitter les Urgences, le temps de faire un examen et de voir le médecin. Avant de repartir rassuré sur son sort, mais pas sur celui de l'hôpital, un plus grand malade que nous, et qui lui n'est toujours pas passé en priorité.