« Et au bout du chemin, la vie » : le récit intime de Charoey Raoul sur son parcours de PMA

Dans un récit autobiographique sincère écrit à Saint-Nazaire, Charoey raconte son chemin vers la maternité à travers l’adoption, la PMA et le poids d’une histoire personnelle complexe.

Sous le soleil de Saint-Nazaire, on la croise sourire aux lèvres, accompagnée de ses deux filles jumelles qui filent en patins à roulettes au Parc paysager. Difficile d’imaginer les épreuves traversées par Charoey Raoul avant d’en arriver là. Son premier livre, Et au bout du chemin la vie, raconte cette aventure universelle : celle d’une femme qui a dû se battre pour donner la vie. Son récit autobiographique est paru en avril dernier, pour redonner espoir à toutes celles qui veulent devenir mère malgré les blessures de la vie.

Une enfance marquée par l’adoption et la quête d'identité

Née à Bangkok en 1974 et adoptée à neuf mois, Charoey grandit à Nogent-le-Rotrou, dans l’Eure-et-Loir, jusqu’à ses 20 ans. Ses papiers d’adoption, quelques lignes administratives à peine, sont longtemps sa seule trace de ses parents biologiques. Animée par un besoin viscéral de comprendre d’où elle vient, elle se lance des années plus tard dans des recherches, allant jusqu’à faire des tests ADN. Elle découvre alors que sa mère était une étudiante thaïlandaise et son père un militaire chinois. « C’est pour cela que j’ai la tête dure comme eux » plaisante-t-elle aujourd’hui. Fascinée par la Chine, elle mesure à quel point cette quête d’identité a façonné son parcours. « On a toujours envie de savoir, de laisser une trace. C’est aussi pour cela que j’ai écrit ce livre pour mes enfants » explique-t-elle.

Un désir tardif de maternité

Dans sa jeunesse, Charoey ne voulait ni mariage, ni enfants. « Je voyais ça peut-être comme une contrainte, avec l’idée qu’un mariage menait forcément au divorce » confie-t-elle. Cette vision, héritée d’échos familiaux négatifs, a marqué ses choix de jeune femme. Elle décrit sa mère comme « aimante mais dure et autoritaire », avec la sensation d’avoir été privée de liberté dans ses études, comme dans ses histoires sentimentales. « Mes petits amis n’étaient jamais assez bien pour elle » se souvient-elle. Ce climat, dit-elle, lui a laissé la peur de reproduire ce schéma. Pourtant, un peu avant de disparaître, sa mère lui lance une phrase qui la libèrera et lui fera changer d'avis. « Tu n’as pas d’enfants, il faut que tu te crées une famille » dit-elle peu avant de mourir. À 40 ans, Charoey a comprend soudain ce qui la retenait jusque-là. « Je pense que j’attendais inconsciemment son accord » reconnaît-elle. Cette prise de conscience tardive ouvre la voie à un nouveau désir : devenir mère, malgré tout.

Le combat de la PMA et l’espoir retrouvé

Avec Anthony, son compagnon rencontré en 2002 et épousé en 2011, elle se lance dans l’aventure de la parentalité. Mais le diagnostic tombe : endométriose. Les tentatives d’insémination et de FIV échouent. Parallèlement, un autre coup dur survient : sa demande d’adoption est rejetée, au motif qu’elle a elle-même été adoptée. Les institutions parlent de « circonstances affectives aggravantes ». Elle tente de se battre, saisit la justice, alerte la presse et la député de sa circonscription, mais perd face au Département. « Les dates qui me font mal, je les ai oubliées » soupire-t-elle aujourd’hui. Alors qu’elle commence à perdre espoir, elle découvre l’association Les Cigognes de l’Espoir. Un médecin lui explique le recours au don d’ovocytes à l’étranger. En France, l’attente est trop longue, et son âge la place dans une course contre la montre. En 2017, elle part en République tchèque, tout juste dans les critères d’éligibilité : moins de 43 ans, moins de quatre tentatives de FIV et six inséminations. Là, le miracle survient : elle tombe enceinte dès la première tentative. En 2018, elle donne naissance à ses jumelles, Jade et Maylee.

Un livre pour ses filles, et pour toutes les femmes

Aujourd’hui, Jade et Maylee sont ses plus grandes fiertés. Et au bout du chemin la vie est d’abord un cadeau qu’elle leur destine. « J’ai voulu leur expliquer comment elles sont venues au monde. Elles auront chacune leur exemplaire réservé » indique Charoey. Mais ce récit va bien au-delà pour elle. Écrit avec la journaliste Sandra Bensoussan, il porte aussi un message pour les autres femmes. « Moi j’ai eu la chance que ça fonctionne du premier coup, alors gardez espoir. N’écoutez pas ce que vous disent vos proches, votre famille, vos amis. Faites-vous confiance, faites-vous toutes seules » insiste-t-elle.