En Loire-Atlantique et Vendée, les sinistrés du logiciel Arpège s’organisent
Un groupe Facebook s'est constitué où les témoignages d'assurés en arrêt maladie affluent, privés du versement de leurs indemnités journalières parfois depuis plusieurs mois. En cause, les anomalies techniques du nouveau logiciel de la CPAM lancé en septembre dernier.
Anne-Sophie est salariée à Saint-Nazaire. Elle se bat contre un cancer à un stade avancé, et a subi de surcoît depuis octobre dernier, l'arrêt du versement de ses indemnités. Un stress insupportable pour cette Nazairienne qui doit pourtant continuer à gérer la fatigue des traitements, l'éducation de ses enfants. Et continuer à vivre malgré l'argent qui ne rentre plus dans le foyer. Elle a rejoint le groupe Facebook Les Sinistrés de la CPAM 44&85. Pour témoigner, s'épauler, partager des informations et des actions. Redonner du courage aux autres. Et pour essayer de débloquer la situation.
«J'ai dû vider mon livret »
Plusieurs mois après l'arrêt du versement de ses indemnités, Anne-Sophie fait les comptes. Par téléphone, elle nous explique «J'ai dû vider mon livret. Mon mari travaille, mais comment font celles et tous ceux qui se retrouvent sans ressources ? ». Près de 1 000 personnes ont rejoint comme la jeune femme le groupe des Sinistrés de la CPAM, depuis sa création il y a 3 mois, et partagent leur histoire. « Bonjour tout le monde, je vous rejoins dans cette galère, je suis en mi-temps thérapeutique depuis le 17 février et on m’annonce un délai de traitement de 163 jours pour la cpam du 44. Pour l’instant je n’ai pas reçu d’indemnités journalières et on m’a dit d’attendre début avril pour demander un acompte » publie un utilisateur ce mardi 11 mars. Une autre témoigne : « J'ai appelé le numéro vert, dossier toujours bloqué et non traité malgré les appels, mails, lettre de mise en demeure, rdv... La personne m'a dit qu'elle remonte mon dossier...On rappellera encore la semaine prochaine ....je ne sais même pas si un jour ça va avancer en réalité je crois que je n'y crois plus ». En désespoir de cause, Anne-Sophie a décidé d'interpeler “les gros bonnets” sur Linkedin. « Écrire aux maires, aux députés, au Président de la république, cela n'a rien fait avancer. Je suis trop fatiguée pour pouvoir me déplacer à la CPAM, c'était la meilleure façon d'agir » soupire-t-elle.
Faire bouger les choses
Sur LinkedIn, Anne-Sophie interpelle la Ministre Catherine Vautrin, le Directeur Général de la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie Thomas Fatôme, ou encore Pierre Peix, Directeur de la CPAM de Loire-Atlantique. En temps normal, on le sait bien, il n'y a pas vraiment de place pour les polémiques sur le réseau social professionnel, et plus particulièrement sur les profils bien lisses des décideurs, où l'on aime s'auto-féliciter, parler bienveillance, et engagement. Le compte de Thomas Fatôme publiait encore ce mardi 11 mars : « Notre mission est de garantir la pérennité de notre système de santé en étant fidèle à la promesse de l'Assurance Maladie : un égal accès de tous à un système de santé d'excellence ». Les réponses fournies aux assurés sur leurs espaces de santé persos ne sont pas de la même teneur : « un délai supplémentaire est nécessaire », « merci de patienter ». Jusqu'à quand ? Hasard ou conséquence, Anne-Sophie a vu sa situation se régulariser quelques jours après ses publications désespérées. Elle n'a pas lâché le groupe des Sinistrés pour autant, en partageant des infos, ou encore une pétition en ligne.
« Le retour à un fonctionnement normal prendra toutefois plusieurs semaines »
Du côté de la CPAM, pas facile d'avoir une date précise de retour complet à la normal. « Des solutions de contournement » sont mises en place pour le versement d'acomptes. « Des versions correctives installées en fin d’année 2024 ont permis de corriger une grande partie des anomalies, et des développements informatiques sont en cours pour régler les derniers problèmes du logiciel. Si la situation s’améliore et que la grande majorité des arrêts de travail sont désormais indemnisés sans difficulté, il reste un volume important de dossiers d’indemnisation à reprendre, notamment des arrêts en temps partiels thérapeutiques et ceux en lien avec un accident du travail ou une maladie professionnelle » indique le service communication de la CPAM de Loire-Atlantique. Des renforts ont été mobilisés par la Caisse Nationale pour traiter les dossiers, et réduire progressivement les délais. « Nous avons également renforcé notre accueil téléphonique pour permettre de répondre aux nombreuses sollicitations des assurés. Le retour à un fonctionnement normal prendra toutefois plusieurs semaines. Dans l’attente, nous continuons à indemniser les dossiers bloqués par le versement d’acomptes, les plus proches possibles du montant dû. Actuellement, environ 3 000 assurés sont payés en acompte en Loire-Atlantique » ajoute la CPAM en évoquant un retour « le plus rapide possible à la normale ».